Isabelle rome

Ministre déléguée chargée de l'Égalité et de la Diversité (France)
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Monsieur le ministre cher Clément, Monsieur le député européen cher Pierre Karleskind, Monsieur l’Ambassadeur au droit des personnes LGBT plus cher Jean-Marc Berthon, Monsieur l’adjoint à la mairie de Paris cher Jean-Luc Romero, Mesdames et Messieurs les présidentes et présidents d’association, Mesdames et Messieurs en vos grades et fonction

Il existe encore dans le monde des endroits où l’amour est interdit. Il existe encore en Europe des régions dites libres d’idéologie LGBT. Jamais je n’ai entendu le mot libre être dévoyé à ce point.

Je me souviens que lors d’un voyage officiel en Pologne mon collègue Clément Beaune n’a pas pu visiter la ville de Krasnik qui fait partie de ces endroits où se nichent la haine crasse, de ces endroits où l’on peut être haït parce que l’on aime, et il ne s’agit là que d’un exemple parmi tant d’autres.

Partout dans le monde, on peut encore subir des discriminations, de la violence, des agressions, des persécutions parce que l’on aime.

J’insiste sur la notion d’amour qui doit sembler un peu naïve mais qui pour moi est centrale dans l’absurdité de ces discriminations. Lorsque j’ai débuté ma carrière de magistrate, j’entendais souvent que j’étais trop naïve. J’ai comme l’impression qu’on ne l’aurait jamais dit à un homme mais qu’à cela ne tienne.

Naïve parce qu’il m’arrivait de me laisser atteindre par les mots d’une victime.

Naïve parce que j’essuyais une larme en entendant un récit poignant.

Naïve parce qu’il m’est arrivé de ne pas demander de détention lorsque cela n’était pas nécessaire.

Et pourtant ma carrière m’amenait devant vous aujourd’hui. Pourtant j’ai l’immense honneur d’être aujourd’hui à la tête d’un ministère qui lutte contre toutes les haines. Toutes les haines. Il m’arrive donc de penser que mes détracteurs confondaient comme beaucoup naïveté et humanité. Je tiens donc à l’affirmer aujourd’hui avec naïveté ou humanité aux personnes LGBT plus. Où que vous soyez dans le monde, la France tiendra à vos côtés. Résolument. Nous ne nous résoudrons jamais à tolérer que vous soyez rejeté.e.s, menacé.e.s, incarcéré.e.s, frappé.e.s ou assassiné.e.s parce que vous êtes homosexuel.le.s ou trans.

La diplomatie que mène la France s’honore à se définir comme une diplomatie féministe, une diplomatie engagée en faveur de toutes celles et ceux dont la vie est menacée et dont la dignité est bafouée. Face aux haines nous agissons. Depuis le premier plan de lutte contre la haine anti-LGBT plus qui faisait suite à l’attentat homophobe d’Orlando, la France s’est dotée d’un volet d’action à l’international. Cher Clément, tu as porté ces combats comme secrétaire d’État puis comme ministre délégué auprès de la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères. Et depuis octobre et comme il s’y était engagé lors de sa campagne le président de la République est la première ministre ont nommé un ambassadeur dédié à la question LGBT plus placé sous l’autorité du Quai d’Orsay. Vous êtes nombreuses et nombreux à connaître et saluer le travail remarquable que mène Jean-Marc Berthon depuis sa nomination, et je le remercie pour le sérieux de son action. Nous sommes fiers et honorés de la collaboration conduite avec nos partenaires aux Nations unies, au Parlement européen, au Conseil de l’Europe. Cette collaboration qui nourrit, j’en suis certaine, la lutte que nous menons en faveur des droits des personnes LGBT plus à travers le monde. Ce changement doit se faire à toutes les échelles et de manière systémique. Ce changement rencontre aujourd’hui de nombreux opposants, j’en parlais un peu plus tôt. Ces opposants sont par exemple ceux qui inventent une idéologie LGBT et s’en servent pour justifier les pires atrocités. Les lois hostiles et rétrogrades que nous voyons fleurir dans certains Etats sont symptomatiques de ce combat dans lequel les femmes et les minorités sont toujours les premières victimes.

Dans ce combat, et je tiens spécialement à le dire aux associations, militantes et militants présents ce soir, mon ministère sera toujours à vos côtés. Quelles que soient les différences, les divergences d’opinions, quelles que soient les polémiques, il ne faut jamais perdre de vue notre objectif : l’égalité.

Depuis plusieurs semaines, je construis en concertation avec les associations LGBT plus un plan de lutte contre la haine anti LGBT plus. Ces concertations nourrissent un plan gouvernemental ambitieux qui mettra à mal les haines anti LGBT plus. Cette concertation se déroule en trois phases. Une première phase de consultation en ligne a été ouverte au plus grand nombre. S’ensuivra une deuxième phase de consultation dans les territoires où nous délocaliserons 6 ateliers de travail dont un en Outre-Mer. Enfin, nous réunirons les associations et les ministères concernés à l’occasion d’un séminaire de plusieurs jours.

Vous l’aurez compris ma méthode est celle du dialogue; de la co-construction. C’est une méthode exigeante et efficace qui nous permettra, je l’espère de tout cœur, de prendre des mesures réalistes et en phase avec les attentes des acteurs. Ce combat est le nôtre et chacun y prend sa place. Je tiens d’ailleurs à saluer très sincèrement le travail des associations dans cette consultation. Je suis certaine qu’elle aboutira à ce que nous pouvons proposer de mieux pour l’intérêt général et j’en profite pour féliciter dès à présent Stop Homophobie pour le travail qui est réalisé chaque jour, et pour l’organisation de cet événement inédit. Vous pourrez compter sur moi pour continuer à me battre et vous pouvez compter sur le soutien de mon ministère.

Nous avons débloqué une enveloppe de 3 millions d’euros à destination des centres LGBT plus. S’il le faut nous irons plus loin, notamment en pérennisant les financements sur plusieurs années. C’est d’ailleurs une politique que je souhaite mener, cette notion de pluri-annualité pour permettre à des actions pérennes de se développer, et d’éviter finalement aux associations de perdre trop de temps pour répondre à des appels au projet qui à mon avis n’ont pas beaucoup de sens quand on a vraiment des plans et donc une politique publique à développer, donc appuyons-nous sur des associations qui savent travailler qui ont fait leurs preuves et faisant des conventions pluriannuelles d’objectifs. Parce que c’est aussi grâce à ces fonds que nous pourrons aider celles et ceux qui en ont besoin sur le territoire national ou ailleurs.

Cela fait des siècles que notre société connaît les violences faites aux femmes, aux personnes LGBT plus, et que le racisme sévit. Nous progressons j’en suis certaine. En 1982 à l’Assemblée nationale, Robert Badinter disait qu’il était temps de prendre conscience de tout ce que la France doit aux homosexuels. Cette prise de conscience nous l’avons eue. Il est maintenant temps de rendre la vue à ceux que la haine aveugle, je vous remercie.

[Applaudissements].