Persécutions liées à la pénalisation de l’homosexualité en Tanzanie

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Les persécutions liées à la pénalisation de l’homosexualité en Tanzanie se retrouvent à l’échelle gouvernementale. Ces persécutions à l’encontre des personnes LGBTQ+ sont brutales, caractérisées par des arrestations violentes, des tests anaux forcés et une incitation à la dénonciation des homosexuels par les autorités.

1. Persécutions liées à la pénalisation de l’homosexualité en Tanzanie : données générales

Au total, entre 2009 et 2023, ILGA World a identifié au moins 24 exemples d’application de la loi pénale, mais le chiffre réel est probablement beaucoup plus élevé. Entre 2015 et 2021, sous le gouvernement de John Magufuli, la Tanzanie a connu une répression accrue contre les personnes d’orientations sexuelles, d’identités de genre et d’expressions de genre diverses, ainsi que contre les soins de santé, les droits humains et l’activisme politique en général. En 2023, il est noté que les représentant.es étatiques ont redoublé d’efforts pour aggraver la criminalisation des personnes LGBTQ+ et pour étendre la législation contre les actes sexuels entre personnes de même sexe. Des représentant.es ont appelé à des peines plus sévères allant de la castration des homosexuels, à la mort de toute personne « confirmée s’étant livrée à des actes homosexuels ».

Un militant a déclaré à ILGA World qu’en 2023 :

« Le contexte politique en Tanzanie est devenu encore plus hostile que l’année précédente pour les personnes LGBTIQ+ et les travailleur·se·s du sexe. Six homosexuels et femmes transgenres ont été condamnés à 30 ans de prison après avoir été contraints de se soumettre à des tests en vertu des articles 154 à 159 du Code pénal de la République-Unie de Tanzanie. Au cours des années précédentes, c’est-à-dire de 2016 à 2019, nous avons vu des dirigeants politiques et religieux tenir des discours de haine à l’encontre de la communauté LGBTIQ+, mais il n’était jamais arrivé que des membres de la communauté soient condamnés à 30 ans de prison. »

Plusieurs organisations ont documenté des niveaux élevés de brutalité policière et de discrimination, y compris l’arrestation systématique de personnes sans inculpation, la violence physique, verbale et parfois sexuelle.

2. Descentes de police et arrestations 

Il y a eu de nombreux cas ces dernières années, notamment à Zanzibar et Dar es Salaam, où les autorités et ont mené des raids violents pour arrêter les individus LGBTQ+ soupçonné.es. Des descentes de police ont eu lieu lors de réunions et d’ateliers, où des arrestations de participant.es et la destruction et la confiscation de biens ont également été signalées.

« Le 29 septembre 2009, 39 militants gays et lesbiennes qui tenaient un meeting à Dar es Salaam ont été arrêtés après que la police a reçu des informations faisant état d’une « anarchie » dans la région. Elles ont été inculpées de prostitution et de vagabondage, et détenues pendant plus de deux semaines dans une prison locale parce que le magistrat leur avait refusé la libération sous caution. Apparemment, le magistrat les a qualifiés de « plaies oculaires » et a déclaré qu’ils devaient être traités « sans pitié »

3. Violences policières et extra judiciaires

En Tanzanie, les personnes LBGTQ+ sont fréquemment sujettes à des agressions physiques, verbales et/ou sexuelles de la part de la police et de la société.

Dans un rapport publié en 2015 par l’Initiative pour la santé et les droits sexuels en Afrique de l’Est, une femme transgenre de Dar es Salaam a affirmé que :

« En raison de la façon dont nous nous identifions et dont nous nous exprimons, [la société et la police] prennent notre argent, sollicitent des pots-de-vin monétaires et sexuels, nous déshabillent, nous battent, nous poursuivent en public et enlèvent nos perruques. Les hommes trans se font déshabiller et souvent violer, notamment à cause de leur apparence androgyne. »

« En décembre 2010, la police a arrêté un homosexuel à Dar es Salaam et l’a forcé, sous la menace d’une arme, à appeler cinq amis homosexuels pour qu’ils se rencontrent dans un bar. La police les a tous arrêtés, déshabillés, battus et détenus au poste central, où ils ont été violés à plusieurs reprises par d’autres détenues, tandis que la police refusait de les aider. Ils ont été relâchés après que l’un des parents a versé un pot-de-vin. »

4. Persécutions liées à la pénalisation de l’homosexualité en Tanzanie : tests anaux forcés

Les tests anaux sont fréquemment utilisés en détention comme preuves d’actes homosexuels.

« Le 13 avril 2023, un homme a été arrêté après avoir prétendument pris contact par téléphone avec un autre homme pour tenter de se livrer à des actes homosexuels. Après son arrestation, il a été soumis à un examen anal par le personnel médical, qui a déclaré qu’il avait eu des « relations sexuelles contre nature ».

5. Chasse aux minorités sexuelles et incitation à la dénonciation

En Tanzanie, la persécution gouvernementale est orchestrée sous forme de « chasse aux homosexuels », et passe par l’exhortation des communautés à les dénoncer aux autorités.

« En octobre 2018, le commissaire de Dar es Salaam, Paul Makonda, a annoncé une répression contre les « homosexuels » et a exhorté les communautés à les dénoncer aux autorités. Makonda a également suggéré un nouveau système de surveillance permettant à la police d’identifier les homosexuels potentiels en ligne et en public, avec la possibilité de compiler une liste de « personnes connues ». 

6. Délit de « promotion de l’homosexualité »

Le délit de « promotion de l’homosexualité » n’existe pas en Tanzanie, mais les autorités (et les médias) ont utilisé ce terme pour arrêter des militant.es et démanteler des organisations opérant dans le pays. Les autorités nationales, régionales et locales ont de plus en plus ciblé les personnes impliquées dans la prestation de services, la santé reproductive ou sexuelle, ou le plaidoyer lié à la SOGIESC. Cela a eu un effet néfaste sur les capacités des organisations LGBT locales, en particulier celles qui travaillent à la prévention et à la sensibilisation au VIH. En effet, dans plusieurs cas, des descentes de police ont été menées contre des groupes et des individus travaillant pour endiguer la propagation du VIH/sida, les autorités accusant ces groupes (qui comprennent des programmes de santé communautaire et des avocats des droits de l’homme) de « promouvoir l’homosexualité ».

« En 2017, le gouvernement était allé jusqu’à fermer plusieurs cliniques de VIH et de santé sexuelle en raison de leur association présumée avec les HSH, et même à interdire les lubrifiants sexuels dans le pays. »

« En septembre 2019, alors qu’il se trouvait à Zanzibar, le vice-ministre de l’Intérieur Hamad Masauni a appelé à l’arrestation de toute personne qui « faisait la promotion » de l’homosexualité. »

Ressources :