Persécutions liées à la pénalisation de l’homosexualité au Cameroun

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Les persécutions liées à la pénalisation de l’homosexualité au Cameroun se manifestent par la stigmatisation sociale et la criminalisation de l’homosexualité ce qui engendrent un climat de persécution généralisée, marqué par des arrestations arbitraires, des violences policières extrêmes, des tests anaux forcés, et une réticence des victimes LGBTQ+ à signaler les abus de peur de représailles, alimentant ainsi un cercle vicieux de violence et d’intolérance sociale.

1. Persécutions liées à la pénalisation de l’homosexualité au Cameroun : données générales

Au Cameroun, la criminalisation de l’homosexualité a engendré un climat de persécution généralisée à l’encontre des personnes LGBTQ+. Entre 2005 et 2023, près de 90 cas ont été documentés, bien que cette statistique ne reflète probablement pas l’ampleur totale des abus. La situation est aggravée par une stigmatisation sociale profondément enracinée et une rhétorique discriminatoire propagée par certains segments de la société, y compris des personnalités politiques. Des déclarations incendiaires, telles que celles attribuant l’homosexualité à des complots occidentaux ou la décrivant comme une menace pour la sécurité publique, contribuent à alimenter les préjugés et à justifier les persécutions.

2. Arrestations et détentions arbitraires

Les personnes LGBTQ+ sont régulièrement soumises à des arrestations arbitraires, souvent sans preuves tangibles et sur la base de leur orientation sexuelle présumée. Ces arrestations sont souvent accompagnées d’examens forcés et d’autres traitements dégradants en détention.

Le ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni a noté en 2020 que des organisations locales de la société civile avaient documenté 21 cas de détention arbitraire en 2014, sept cas en 2015 et 33 cas en 2016. Entre 2016 et 2018, près de 1 800 personnes ont été signalées par les autorités, faisant état d’arrestations, d’extorsions et de violences en raison de leur orientation sexuelle et/ou identité de genre réelles ou supposées.

En 2019, Humanity First et Alternatives Cameroun ont noté que 27 arrestations arbitraires fondées sur l’orientation sexuelle ont eu lieu cette année-là.

Selon Human Rights Watch, « les forces de sécurité ont arbitrairement arrêté, battu ou menacé au moins 24 personnes pour leur homosexualité présumée ou leur identité de genre non conforme » entre février et avril 2021 seulement.

3. Violences policières, torture et mauvais traitements

De très nombreux cas de violences policières d’une extrême gravité ont été rapportés ces dernières années. Les traitements réservés aux personnes LGBTQ+ sont d’une violence exacerbée. En voici quelques exemples.

« Et le 24 février 2021, 13 personnes arrêtées pour homosexualité ont témoigné de la manière violente et déshumanisante dont elles ont été traitées. La police aurait dit aux détenus qu’ils étaient « des démons, pas des humains, pas normaux », aurait agressé physiquement plusieurs d’entre eux et leur aurait fait signer des déclarations sans leur permettre de lire ni leur permettre d’être représentés par un avocat ».

« Le 14 avril 2021, Human Rights Watch a publié un résumé des cas connus jusqu’à présent, notant que « les forces de sécurité ont arbitrairement détenu, battu ou menacé au moins 24 personnes, dont un garçon de 17 ans, pour avoir prétendument été homosexuel ou non conforme au genre, depuis février 2021 ».

« Human Rights Watch a rapporté que le 10 avril 2022, à Yaoundé, un gang de huit hommes armés a attaqué une fête privée d’au moins 10 personnes LGBT+. Deux des victimes ont été aidées par un membre de la communauté à se rendre dans un poste de police voisin, bien que les gendarmes en service se soient moqués d’elles et les aient agressées physiquement, en disant : « Nous devrions les tuer parce que ce sont des monstres. » Les agents ont fouillé leurs téléphones à la recherche de preuves qu’ils étaient homosexuels et ne les ont relâchés qu’après avoir payé un pot-de-vin de 15 000 francs CFA (environ 24 dollars). Les huit autres victimes ont été rattrapées et agressées par la foule en colère pendant au moins deux heures sans intervention de la gendarmerie, et les assaillants les ont volées avant de se disperser ».

Certains rapports indiquent qu’il est courant que tous les prisonniers incarcérés au Cameroun ne reçoivent qu’un seul repas par jour, et que leurs amis et leur famille leur fournissent de la nourriture et des fournitures supplémentaires.

4. Arrestations de masse

Des cas d’arrestations de masse ont été rapportés ces dernières années au Cameroun. La police cible des lieux et des événements potentiellement fréquentés par des personnes LGBTQ+, et procèdent à des arrestations massives.

« Aux premières heures du 12 mai 2018, la police a effectué une descente dans plusieurs lieux de Yaoundé qui étaient considérés comme des points chauds pour les activités sexuelles entre personnes de même sexe, notamment un club et un cinéma. Au total, 25 personnes ont été arrêtées, mais deux d’entre elles ont été relâchées peu de temps après avoir été identifiées comme des témoins et non comme des suspects potentiels. Les 23 autres auraient été détenus et torturés pendant deux jours, puis relâchés sans inculpation ».

5. Tests anaux forcés

Les tests anaux sont fréquemment utilisés comme preuves d’actes homosexuels.

6. Persécutions liées à la pénalisation de l’homosexualité au Cameroun : revictimisation

Malgré les dispositions légales punissant la violence physique, les victimes LGBTQ+ sont souvent réticentes à signaler les abus par peur de représailles, conscientes de la criminalisation de l’homosexualité. Ainsi, l’accès à la justice pour ces personnes est entravé par leur peur d’être arrêtées, détenues et torturées si elles signalent une agression.

« En janvier 2017, un homosexuel qui s’était rendu aux autorités pour signaler une agression physique a fait l’objet d’un chantage de la part d’un commissaire de police adjoint et a été emprisonné parce qu’il ne pouvait pas payer ».

7. Intolérance sociale et violence extrajudiciaire

Au Cameroun, la stigmatisation sociale à l’égard de l’homosexualité persiste de manière alarmante. La violence extrajudiciaire demeure un problème grave, avec des agressions physiques fréquentes contre les personnes LGBTQ+. Cette violence est exacerbée par l’indifférence ou la complicité de la police. De très nombreux cas d’agressions d’une violence extrême envers des personnes LGBTQ+ ont été rapportés ces dernières années. Rien qu’en 2019, plus d’un millier d’incidents de violence et de discrimination à l’encontre de personnes en raison de leur orientation sexuelle ont été signalés.

« En août 2016, un jeune homosexuel a été agressé physiquement puis forcé par son agresseur à révéler sa sexualité à une foule de personnes sur un campus universitaire de Yaoundé. La foule l’a poursuivi jusqu’à un poste de police voisin, où il a été arrêté. Il se serait vu refuser l’accès à un avocat et l’issue de son procès n’est pas connue ».

« Le 14 juillet 2018, une femme trans de Yaoundé aurait été agressée par un groupe de sept hommes. Ils lui ont volé son sac à main, déchiré ses vêtements, l’ont battue et lui ont brûlé les mains. La police est finalement intervenue, mais les agresseurs ont été relâchés pendant que la victime était en détention. La police lui a coupé les cheveux et a refusé de lui fournir des soins médicaux, exigeant qu’elle cesse de s’habiller comme une femme. Plus tard, ses amis ont versé une caution pour la faire libérer ».

Ressources :