Pénalisation de l’homosexualité au Nigéria : les rapports sexuels consensuels entre personnes de même sexe sont interdits par le droit fédéral, qui pénalise également les unions homosexuelles et les espaces dédiés aux personnes LGBTI+. La pénalisation des relations homosexuelles est durcie dans certains Etats, allant jusqu’à l’imposition de la peine de mort lorsque la charia est en vigueur.
1. Pénalisation fédérale de l’homosexualité
1. Interdiction des rapports sexuels consensuels entre personnes de même sexe
Les articles 214 et 215 du code pénal du Nigéria (2004) disposent que:
Article 214. Infractions contre nature
« Toute personne qui
(1) a des relations charnelles avec toute personne contre nature ; ou
(2) a une relation charnelle avec un animal ; ou
(3) permet à un homme d’avoir des relations charnelles avec lui contre l’ordre naturel,
est coupable d’un crime et est passible d’une peine d’emprisonnement de quatorze ans.”
Article 215. Tentative de commettre des délits contre nature
« Toute personne qui tente de commettre l’une des infractions définies à l’article 214 du présent Code, est coupable d’un crime et est passible d’une peine d’emprisonnement de sept ans. Le contrevenant ne peut être arrêté sans mandat.”
Les articles 214 et 215 répriment ainsi le fait pour une personne d’avoir, ou de tenter d’avoir, des “relations charnelles contre nature”. Cette notion fait en réalité référence aux rapports sexuels avec une personne du même sexe. Il s’agit d’une pénalisation de l’homosexualité, entendue comme un comportement sexuel et cela sans distinction de genre.
Les lesbiennes et les gays peuvent donc être poursuivis au Nigéria sur le fondement de ce texte en raison d’un rapport sexuel privé entre adultes consentants, qu’il soit effectivement commis ou simplement tenté tenté.
La peine maximale encourue est une peine d’emprisonnement de 14 ans. S’il s’agit d’une simple tentative, la peine encourue est alors de 7 ans d’emprisonnement.
2. Pénalisation des espaces et des unions homosexuels
L’article 5 de la loi dite “Same-Sex Marriage Prohibition Act” de 2013 dispose que:
(1) Quiconque conclut un contrat de mariage ou une union civile entre personnes de même sexe commet une infraction et est passible, sur déclaration de culpabilité, d’une peine d’emprisonnement de 14 ans.
(2) Toute personne qui s’inscrit, exploite ou participe à des clubs, sociétés et organisations gays, ou qui, directement ou indirectement, montre publiquement une relation amoureuse entre personnes de même sexe au Nigeria commet un délit et est passible, sur déclaration de culpabilité, d’une peine de 10 ans d’emprisonnement.
(3) Une personne ou un groupe de personnes qui administre, est témoin, encourage ou aide à la célébration d’un mariage ou d’une union civile entre personnes de même sexe, ou qui soutient l’enregistrement, le fonctionnement et la subsistance de clubs, sociétés, organisations, processions ou réunions gays au Nigeria s’engage une infraction et est passible, en cas de condamnation, d’une peine de 10 ans d’emprisonnement.
L’article 5 de cette loi réprime en premier lieu le fait de conclure pour soi-même, de soutenir, ou d’administrer la conclusion d’un mariage ou une union civile entre personnes de même sexe. Il s’agit donc d’une pénalisation de l’homosexualité, reposant sur la répression des unions entre personnes de même sexe.
Toute personne qui conclut une union homosexuelle au Nigéria encourt donc une peine d’emprisonnement de 14 ans. Les personnes ayant participé de quelque manière que ce soit à l’officialisation d’une telle union encourent quant à elles 10 ans d’emprisonnement.
Cette loi réprime également le fait de contribuer à la vie d’espaces dédiés aux personnes homosexuelles (tels que des clubs ou des organisations). Toute personne qui crée, administre, ou bien qui participe simplement à des espaces gays au Nigéria encourt 10 ans d’emprisonnement.
L’article 5 réprime également le fait de montrer publiquement (directement ou indirectement) une relation amoureuse entre personnes de même sexe. Cette infraction concourt également à la pénalisation de l’homosexualité en tant qu’identité visible dans l’espace public. Ainsi, toute personne qui participe à la visibilisation d’une relation homosexuelle dans l’espace public au Nigéria encourt une peine de 10 ans d’emprisonnement.
2. Pénalisations locales de l’homosexualité
1. Etats du Nord: interdiction des rapports sexuels consensuels entre personnes de même sexe
Le code Pénal des Etats du Nord de 1959 s’applique comme droit à la fois fédéral et étatique dans les États qui ont succédé à la région coloniale du Nord. Or, l’article 284 de ce code dispose que :
“Quiconque aura des rapports charnels contre nature avec un homme, une femme ou un animal sera puni d’un emprisonnement pouvant aller jusqu’à quatorze ans et sera également passible d’une amende.”
L’article 284 du Code pénal des Etats du Nord réprime donc les actes sexuels consensuels entre personnes de même sexe ( considérés comme des “rapports charnels contre nature”). Il s’agit d’une pénalisation générale de l’homosexualité, entendue comme un comportement sexuel entre deux personnes de même sexe.
Dans les Etats du Nigéria appliquant ce code pénal, les relations sexuelles homosexuelles sont donc passibles d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 14 ans et d’une amende.
2.Peine de mort dans certains états (charia)
Douze États du Nord ont adopté un code pénal basé sur la charia. Il s’agit des États de Bauchi, Borno, Gombe, Jigawa, Kaduna, Kano, Katsina, Kebbi, Niger, Sokoto, Yobe et de Zamfara.
Ces codes pénaux prescrivent donc la peine de mort pour les relations sexuelles entre personnes de même sexe.
3.Législation propre à l’état de Kaduna sur l’interdiction des rapports sexuels consensuels entre personnes de même sexe
L’article 259 du code pénal de l’état de Kaduna (2017) dispose que:
« Quiconque a des rapports sexuels contre nature avec un homme, une femme ou un animal, tels que la sodomie, le lesbianisme ou la bestialité, sera puni d’une peine d’emprisonnement d’au moins 21 ans et sera également passible d’une amende d’au moins 200 000 nairas ».
L’article 259 réprime expressément les rapports sexuels dits “contre-nature”, en faisant explicitement référence à des pratiques comme la sodomie et le lesbianisme.
Il s’agit donc d’une pénalisation de toutes les relations sexuelles entre personnes de même sexe. Les lesbiennes et les gays encourent donc 21 ans de prison et 200 000 nairas d’amende s’ils ont des rapports sexuels dans l’état de Kaduna.
3. Ressources sur la pénalisation de l’homosexualité au Nigéria
- Same-sex prohibition Act (2013)
- Code pénal des Etats du Nord (1998)
- Code pénal de l’Etat de Kaduna (2017)
- State Sponsored Homophobia, rapport de l’ILGA de 2021: https://ilga.org/downloads/ILGA_World_State_Sponsored_Homophobia_report_global_legislation_overview_update_December_2020.pdf
- Rapport de l’ILGA en Français, « Nos identités en état d’arrestation »